• L’écriture sur le corps des femmes assassinées de Ciudad Juarez.

    - Rita Laura Segato -

     

    dans la très longue histoire du genre, si longue qu’elle se confond avec l’histoire de l’espèce, la production de la masculinité obéit à des processus différents de ceux de la production de la féminité. Dans une perspective transculturelle, des évidences montrent que la masculinité est un statut qui se gagne de manière conditionnelle – devant être reconfirmé avec une certaine régularité tout au long de la vie. Ce statut s’obtient par un processus d’admission ou de conquête. Il est surtout soumis au prélèvement d’un tribut à un tiers qui, de par sa position naturalisée dans cet ordre statutaire, est perçu comme concessionnaire du répertoire de gestes qui alimentent la virilité. Cet autre, dans l’acte même par lequel il ou elle attribue la masculinité, produit sa propre exclusion de la caste qu’il ou elle consacre. En d’autres termes, pour qu’un sujet acquière son statut masculin, tel un diplôme, tel un grade, il est nécessaire qu’un autre sujet ne l’ait pas mais le lui accorde au cours d’un processus persuasif ou contraignant qui peut être efficacement décrit comme processus de prélèvement. Dans des conditions sociopolitiques « normales » de l’ordre du statutaire, nous, les femmes, sommes les donneuses du tribut ; eux, les récepteurs et bénéficiaires. Et la structure qui lie les femmes et les hommes établit un ordre symbolique marqué par l’inégalité en vigueur qui organise toutes les autres scènes de la vie sociale régies par l’asymétrie d’une loi de statut.

     

    « Reboiser l'âme humaine. Julos Beaucarne -Georges Hyvernaud - La peau et les os - »

  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires

    Vous devez être connecté pour commenter